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Jouer juste
Roman, 2003, éditions Verticales
Présentation par l’auteur
Vous ne savez rien. Même jouer au foot, vous croyez savoir mais vous ne savez pas. Vous ne savez pas comment aimer non plus. On ne vous a rien appris.
C’est maintenant que ça commence.
Présentation de l’éditeur
Nous sommes en pleine finale d’une Coupe d’Europe de football. A la fin de la deuxième mi-temps plus exactement, juste avant les prolongations, à ce moment précis où l’un des deux entraîneurs – et narrateur omniscient de ce premier roman – livre d’ultimes conseils à ses joueurs et les exhorte à “jouer juste”. Et, bien sûr, il est question de tactique, ou plutôt d’une philosophie du jeu qui, tout en collant à la situation du match en cours, décolle légèrement de la réalité pour devenir une sorte de traité de chorégraphie sportive. Mais entre franc-parler et digressions métaphysiques, ce discours magistral déborde de son sujet pour devenir littéralement borderline. D’autant que vient bientôt s’immiscer à l’intérieur de cette voix le récit d’un amour passé avec une certaine Julie.
Dès lors, les conseils de l’entraîneur ne cesseront plus d’entretenir de curieux échos avec l’histoire de la fin annoncée d’une passion amoureuse. Imperceptiblement, à mesure que les deux pôles de ce flux verbal convergent, tout se met à faire double sens sur les terrains mitoyens de la vie à deux (en couple) ou à onze (en équipe). Et ce jeu métaphorique n’a pas besoin d’être appuyé, ni souligné, il joue tout seul à la lecture. D’autant que ce logicien du ballon rond, applique à sa relation avec Julie des règles tout aussi drastiques, un sang-froid tactique et des interdits contraignants qui délimitent un terrain et une discipline au risque de tarir toute sentimentalité à sa source. Car il s’agit bien de “jouer juste”, non pas contre son camp, mais contre les écarts désordonnés, sirupeux et ridicule de la passion. Il s’agit de pousser dans ses derniers retranchements l’amour du jeu, et le jeu de l’amour, ce qui revient au même.
A ce stade du récit, le narrateur traverse un état d’extrême confusion. Pris au piège d’une autodiscipline toujours plus hystérique, obsessionnelle et paranoïaque, il n’a plus d’autre issue que de donner un coup de pied dans la fourmilière, un vrai coup de pied dans le château de cartes qu’il vient d’échafauder. Au terme de cet accès de folie, et de claustration mentale, le narrateur, mis au pied du mur de ses propres paradoxes, n’aura donc réussi qu’à échouer : ses principes d’ascèse amoureuse le vouant à une parfaite solitude, ses principes du beau jeu vouant son équipe à une juste défaite. Car, dans ce vertige du désamour courtois, de l’art pour l’art du sport, tout n’est que perte sans profit, sauf l’honneur.
Dans ce premier roman atypique, François Bégaudeau a su habiter une parole à la fois artificieuse et fébrile, sophistique et compulsive, badine et hallucinée. La seule dynamique du discours parvient à entraîner le lecteur au sein d’un système de pensée torve, dont les à-côtés comiques redouble le vertige mental. Et si ce roman d’une seule voix semble par principe devoir échapper aux faux-semblants du lyrisme, la froideur ici à l’œuvre ne saurait dissimuler, en creux, les failles sensibles et les aveuglements extralucides de ce narrateur, sinon sa fraternité bravache avec un Don Quichotte d’aujourd’hui.
Autour de Jouer juste
En 2006 le roman a été adapté au théâtre par Régis Bourgade qui jouait seul en scène sur une mise en scène de Isabelle Duprez. Lire la critique de Fluctuat.net ici.
A lire également, toujours sur Fluctuat, l’entretien avec François Bégaudeau publié lors de la sortie du livre en 2003.
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9 Commentaires
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- François Bégaudeau – Revenir au texte – Site Title - […] de ce premier roman Jouer juste (Verticales, 2003): comment est-il né ? J’avais vraiment pris la décision d’écrire, cette […]
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… / Les moyens justifiaient la fin / … enfin le sentiment de piger mieux jouer juste
et c’est grâce à ça http://www.lemonde.fr/sport/article/2015/12/31/cher-michel-par-francois-begaudeau_4840409_3242.html
normal remarques, c’est par ce moyen – le foot, les passes, le jeu – que François Bégaudeau y parle
de quoi déjà? du jeu,
** Aktéon théâtre, décembre 2015: 3e! (en version corrigée avec un vraiment au lieu de vraiement et un je comprends que ça qui remplace le … / Et e comprends que ça / …)
Sure que c’est ici que mes lignes seront le plus chez elles :- )
* Un peu comme avec le trio d’un deux un deux, pendant que tu rentres, commentes, rigoles, négocies ta place avec la pote, dit que t’as chaud en gaussant la ménopause qu’elle n’aura jamais du coup la pauvre pendant que la dite t’encourage gourmande à enlever bien plus que ton écharpe et ton pull, l’acteur penseur rodine, est en place en centre de scène sur un tabouret et ses pieds nus comme son crâne.
Le public adapté à la taille de la salle s’apaise, se racle la gorge et se tait au vu de son âge sans qu’un quelconque pseudo-éducateur ne les rappelle à l’ordre. Le spectacle peut commencer.
Du coup, la pause clop que se tape l’acteur alors, comme parti en coulisse sous l’œil complice d’une cam, on la partage avec lui jusqu’à se demander un peu si ça va durer encore longtemps son cirque.
Comment lit-on parfois déjà? son œil torve? Sans bien comprendre ce que ça peut vouloir vraiment dire je dirai que ce soir là, à ce moment-là, j’ai trouvé que son œil à l’acteur, il était sacrément torve. J’aime bien.
Et je comprends que ça, entre autres, c’est grâce à Christophe Tostain.
On s’est un peu mis d’accord depuis avec ma pote sur le fait qu’au début, le débit du narracteur surprend quelque peu. En guise d’articulation, on a un débit à 2 de tense qui, de fait, semble se délecter des mots qu’il partage, les déguster après humectation appliquée, bien se les imprégner en bouche avant de nous les mettre dans l’oreille.
Et puis, assez vite, il va se lever, parler plus fort, tournoyer, tragédier, invectiver, raisonner, imposer la négociation, cheminer en labyrinthe dans son mental, presqu’en chuchotant, sacrément morfler en fait d’être centré sur une Julie qui, vaporeuse, souriante, légère et plutôt disponible, nous emporte, sans même avoir besoin de se présenter devant nous avec sa chair et ses os.
Voir Jouer Juste à l’Aktéon est un chouette cadeau. En donnant du corps au texte, Erick Deshors me l’a densifié alors que mes nombreuses et préalables lectures des lignes de François Bégaudeau me donnaient l’idée je crois qu’on ne pouvait être plus fort que ça.
Drôle de sensation,
maudite motte.
ps: très curieuse du retour de quelqu’un qui irait découvrir le texte mis en scène par Fabrice Michel sans y avoir mis le nez avant, vraiment.
Je ne sais trop où écrire sur ce livre que je viens de finir et j’ai les doigts engourdis, défaut d’irrigation capillaire.
Après le texte mode d’emploi de Stéphanie ? Non.
Ce que j’ai lu dans jouer juste ne correspond pas à la relation décrite pas Stéphanie. Si j’ai bien compris la mission de Stéphanie, elle était de s’inspirer de jouer juste pour donner un mode d’emploi du couple plus adouci, plus souple pour que ça tienne (le couple). La base de jouer juste est une extrême, une base rigide qui mène à l’impossibilité du couple à perpétuité et c’ est logique.
Reprenons, logique du jeu :
Je passe la suite, pas facile de savoir où s’arrêter avec ces phrases interminables.
Autre facteur qui permet de produire de la puissance au jeu :
J’aime beaucoup cette idée de bloc autonome, si c’ est pas radical ça.
On remarquera que cela procède d’ôter tous facteurs humains.
Mais aussi, application pour la relation à Julie :
Exclusion de la vanité individuelle au profit de la création. Abnégation de soi ? Non parce que négation=dématérialisation,en ôtant les éléments de base on ne produit rien. Néant.
Il s’agit plus d’éléments réels qui en s’ajustant produisent de la puissance.
Le but :
Nous y voilà donc, tendus vers le surhumain.
Et alors bizarrement alors qu’ à l’origine il est question de surtout pas de :
Le jeu produit une puissance où les éléments communiquent pour ne former qu’une seule et même personne, qu’on appellera la tierce personne et qui me semble être le surhumain.
Mais je crois que je délire en nietzschéenne avec un chien dans le ventre.
La coïncidence a voulu que je lise juste avant Histoire d’hommes de X. Durringer – Editions Théâtrales. Il y a cet usage commun des: j’ai dit, il ou elle a dit que j’ai apprécié tout comme le style atypique de Jouer juste.
C’est peut-être idiot mais j’aime autant le titre de vos oeuvres que les oeuvres elle-mêmes. Toujours bien trouvé bien pensé (qu’il soit de vous-même ou de l’éditeur).
Il était temps de lire ce premier roman.
J’espère que les fonds et aides nécessaires seront trouvés afin que la réalisation du projet cinématographique aboutisse.
Je conviens qu’il s’agit d’une (très faible) minorité mais des joueurs fidèles à leur club ça existe (ou a existé). Vous avez certainement plus de noms que moi. Il faudrait déterminer à combien d’années estime-t-on la fidélité à un club pour un joueur.
@Ph: moi aussi j’ai bien aimé les « j’ai dit », « elle a dit », ces dialogues courts, percutants, vrais.
il y a aussi la performance d’un monologue de 92 pages avec les passages du professionnel (foot) au privée (la relation amoureuse de l’entraîneur)et vice-versa, des enchaînements très bien négociés à chaque fois
J’aime beaucoup ce premier livre que je trouve inclassable dans la mesure où je ne le relie à rien de connu pour moi. et c’est très bien : plus d’écoute, plus de silence dans la lecture.
Je ne saurais jamais comment j’aurais perçu ce roman s’il avait été le premier lu de la bibliographie de FB.
Jouer juste entrera dans l’âge bête le 5 septembre?
l’est né le même jour que Freddie? c bien ça doc? 5 sept.2003?
benh ça c cool dis donc
.9 ans: faisiez quoi digne de l’âge bête à 9 ans doc?
en ce qui me concerne, je vais réfléchir enfin essayer d’y réfléchir
-vraiment cool c’t’histoire du 5/09-
j’aime bien les p’tits trucs comme ça
http://www.youtube.com/watch?v=0wihvdDU7pE
@perdrirazorback: il est grand freddie. merci pour la chanson perdri.
ces derniers jours la vie est pas trop mal faite
j’ai relu Jouer juste et réécouté Sans titre du Grand Corneille,
quand vous demandez -conseillez? recommandez?- à Julie de regarder vos cernes, votre visage autrement quand vous lui proposez le deal de jouer juste voilà comment il le lui chanterait
http://www.deezer.com/fr/music/track/4565984